L’affaire GKS.gs ira bien en appel

L'affaire GKS.gs ira bien en appel

Le 22 octobre 2015, le tribunal correctionnel de la Rochelle condamnait l’administrateur de GKS.gs à 3 millions d’euros de dommages et intérêts. Selon nos informations, il y aura bien appel dans ce dossier.

En cette fin d’année 2015, les juges avaient estimé que, du fonctionnement de ce site-tracker à son historique en passant par les commentaires de Boris P., administrateur du site, tout démontrait « le caractère manifestement illicite de son activité et de son logiciel », destiné à la mise à disposition sans droit de milliers d’œuvres protégées.

Pour cette procédure initiée par la SACEM, le tribunal s’était reposé sur l’article L335-1-2 du Code de la propriété intellectuelle. Issu de l’amendement « Vivendi » à l’époque des débats sur le projet de loi DADVSI , il punit aujourd’hui jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende le fait « d'éditer, de mettre à la disposition du public ou de communiquer au public, sciemment et sous quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'œuvres ou d'objets protégés ».

De la notification, ou non, de l'amendement Vivendi

On ne connait pas encore le moteur de cet appel, dont la confirmation marque sans doute l'échec d'éventuelles négociations. En attendant, lors de la première instance, Me Ronan Hardouin, avocat de Boris P. avait jaugé l’article inopposable en France, faute pour cette règle technique d’avoir été préalablement notifiée à la porte de la Commission européenne.

Le tribunal avait rapidement balayé l’analyse, constatant que cet article L335-2-1 du CPI est inscrit dans le titre 1 de la loi DADVSI consacré aux « dispositions portant transposition de la directive 2001/29/CE » sur le droit d’auteur. Il n’y avait donc pas lieu de notifier un texte venant lui-même transposer une directive.

Seulement, tout n’est pas si simple. Lorsqu’ils portèrent l’amendement Vivendi, les députés Thierry Mariani et Christian Vanneste avaient affirmé que « leur » disposition était simplement « conforme à l’esprit de la directive » sur le droit d’auteur, rêvant alors d’« un écho dans de nombreux autres pays » voire qu’elle puisse un jour lointain « inspirer le législateur communautaire au moment de la révision de [cette] directive du 22 mai 2001 ». N’est-ce pas le plus beau témoignage que le texte Vivendi ne transpose aucune disposition de la directive ?

Un site est-il un logiciel ?

De même, l’avocat avait plaidé sans succès le statut d’hébergeur du site GKS.gs. Sachant que le droit pénal est d’interprétation stricte, il contestait encore qu’un site puisse être considéré comme un « logiciel ». L’analyse avait d’ailleurs été partagée préalablement par Mireille Imbert-Quaretta. Alors présidente de la Commission de protection des droits à la Hadopi, celle-ci avait suggéré au législateur de revoir le champ de l’article L.335-2-1 afin que l’incrimination vise également les « sites qui incitent délibérément à la contrefaçon » (p. 34 de ce rapport).

Un lien vers un contenu ilicite est-il illicite ?

Surtout, ce dossier devrait être nourri par une affaire actuellement sur le grill de la Cour de justice de l'Union européenne. Celle concernant le statut des hyperliens tissés vers des contenus illicites. Pour l'heure, l'avocat général a déjà estimé qu'un lien vers un contenu illégal ne constitue pas une communication au public exigeant l'autorisation préalable du titulaire de droits.

Source : nextinpact